Rapport aspects juridiques de la manipulation de l’information

Collectif

Auteurs : NORMA (sous la direction d’Alexandre Clabault et Baptiste Ferszterowski, avec la collaboration du Campus Cyber, CNRS, état-major des armées et INRIA)
Ce rapport dresse un panorama complet des enjeux juridiques liés à la manipulation de l’information, abordant tant la diversité des pratiques que la multitude des outils de lutte disponibles en France et en Europe en 2025. Le document expose la difficulté à encadrer juridiquement les campagnes de désinformation, qui exploitent la zone grise entre la liberté d’expression et la nécessité de protéger les intérêts fondamentaux de la Nation. Après une grille de lecture systémique, il analyse les différentes strates de l’espace informationnel (physique, virtuelle, cognitive) et propose une classification des fondements juridiques selon la nature de la manipulation (fausseté, atteinte à la confidentialité ou à la propriété, fonctions de l’information) et le canal de diffusion (presse, plateformes, réseaux). Les dispositifs répressifs existants—du pénal (fausse nouvelle, diffamation, harcèlement, montage illicite, usurpation d’identité, sabotage) au civil (concurrence déloyale, contrefaçon)—sont décrits, en soulignant l’apport des lois récentes (anti-fake news, DSA, IA Act, DMA…).
Le rapport présente le « framework NORMA Blue » : une méthodologie structurée pour conduire des opérations juridiques face à une manipulation (cycle planification-préparation-exécution-évaluation). Les recommandations appellent à élargir l’approche juridique, renforcer les synergies public/privé, promouvoir une doctrine offensive, et institutionnaliser la recherche appliquée (« lawfare ») pour élever le niveau de réponse face à l’évolution des menaces hybrides.

Éléments clés à retenir :

  • La manipulation de l’information est un phénomène global aux répercussions politiques, économiques et sociétales.

  • L’arsenal juridique est vaste (pénal, civil, droits spécifiques), mais souffre de cloisonnement, d’absence de cadre dédié et de difficulté à articuler protection de la société et liberté d’expression.

  • Les nouvelles législations (DSA, IA Act, lois françaises récentes) imposent des obligations renforcées sur la transparence, la responsabilité et la traçabilité, pour les plateformes et producteurs de contenus.

  • Le rapport promeut un cadre d’action adaptable (NORMA Blue), inspiré des standards cybersécurité et basé sur des phases : planification, préparation, exécution, évaluation.

  • Sont identifiées comme cibles prioritaires : les campagnes de fake news, de deepfakes, les ingérences étrangères, la manipulation financière et commerciale.

  • Parmi les mesures innovantes proposées : création d’une réserve d’experts juridiques, renforcement de la coordination institutionnelle, développement de contentieux de masse, et labellisation systématique des contenus IA à risque.

  • Nécessité de former à ces enjeux tous les acteurs du droit, de l’information et de la cybersécurité.

  • Accent mis sur la nécessité de communication stratégique : présenter la manipulation comme un « sabotage informationnel » pour éveiller à ses dangers.


RAPPORT_Aspects-juridiques-manipulation-information_102025.pdf